En réponse aux questions de nos lecteurs concernant le masque mortuaire d’Antonin Artaud, nous partageons les premières notes fragmentaires d’un article en préparation pour le numéro 9 de septembre 2024, publié dans la revue Écho Antonin Artaud :
a) Ce masque en plâtre du visage d’Artaud a été réalisé et offert en un exemplaire unique à Jean Paulhan. Plus tard, lors d’une visite chez Jacqueline et Frédéric Paulhan. Paule Thévenin découvre ce masque et décide d’en faire huit reproductions en bronze, auxquelles s’ajoutent deux épreuves d’artiste. Une épreuve est remise à Jacqueline et Frédéric Paulhan. et l’autre à Paule Thévenin. Finalement, Paule Thévenin semble avoir récupéré le masque original en plâtre, qui aujourd’hui est précieusement conservé à la Bibliothèque nationale de France.
b) Sur la couverture du livre L’Affaire Artaud, écrit par Françoise de Mèredieu ou dans A sinister assassin de Stephen Barber figure une photographie de ce masque. Quant à la sculpture en bronze du masque, mentionnée dans le blog navigate.fr, il s’agit d’une réplique réalisée à la demande de Jean Paulhan.
c) L’importance et la signification profonde de ce masque sont mises en lumière par André Voisin, à travers son témoignage dans le film « Artaud le visage », ainsi que dans l’ouvrage « Artaud vivant », co-écrit par Alain et Odette Virmaux : « J’ai immédiatement foncé à Ivry. C’était l’après-midi, quelques amis étaient déjà là quand je suis entré dans la chambre : Adamov, Roger Blin entre autres. Et puis un mouleur était présent, qui venait prendre l’empreinte du masque mortuaire. Artaud était étendu sur son lit, on avait disposé entre ses mains un tout petit bouquet de violettes, c’était très beau. A mon arrivée, le moulage avait déjà commencé. J’ai regardé la scène. Adamov est sorti, je crois : il ne pouvait pas supporter le côté, comment dirai-je, « mécanisé » du mouleur qui faisait son travail comme un plâtrier, tranquillement. Et c’est vrai qu’il y avait dans cette opéra- Pour ma part, je trouvais très beau ce silence, ce calme fantastique qui régnait dans la pièce. Puis le moulage a pris fin, le mouleur a enlevé le masque, et Artaud est apparu couvert d’une paraffine ambrée, comme un vieux guerrier, comme tous les personnages d’un théâtre royal qui n’a jamais été écrit mais vers quoi il tendait. Après cela, le mouleur a peigné ses cheveux, et comme ils étaient encore humides, cela formait de grands rayons, une véritable couronne de cheveux dressés tout autour de son visage. Je me souviens avoir dit à Roger Blin : “Il faudrait le laisser comme ça.” Évidemment, ce n’était pas possible, et le mouleur l’a repeigné normalement. Mais je garde la vision d’un fantastique légionnaire de l’impossible ; c’était comme un soldat du poème essentiel, du chant du monde. Il était allé jusqu’au bout sur ce chemin, et puis il était là, paisible, comme un combattant qui a fini de combattre. »

J’ai trouvé la photo sur le site navigard.fr, sous le titre « Jaqueline Paulhan, masque mortuaire d’Artaud.
